Les avantages pédagogiques de l’évaluation par les pairs

L’évaluation par les pairs c’est quoi ?

L’évaluation par les pairs est une pratique consistant à faire évaluer un étudiant par un ou plusieurs autres étudiants. Celle-ci peut être mit en place dans de nombreuses situations afin de répondre à divers objectifs. Ainsi, cette méthode donnera lieu à des feedbacks ; ces retours de performances, pourront soit être centré sur le résultat du travail, soit sur les processus de travail (Elliott, 20051). Dans les deux cas, l’évaluation par les pairs présente de nombreux avantages. Nous allons vous les détailler dans cet article faisant une synthèse des travaux scientifiques portant sur le sujet.

Les avantages pédagogiques de la méthode

Rend les étudiants actifs du processus d’évaluation

Les étudiants dès la maternelle et jusqu’à la fin de leurs études supérieures sont évalués. Pour eux, c’est un procédé logique dans lequel ils sont passifs, celui-ci permettant de valider leurs acquis ou non. Avec l’évaluation par les pairs, l’étudiant devient actif dans le processus et se l’approprie (Brindley & Scoffield, 19982). Ainsi, l’évaluation devient un élément formatif et donc une opportunité d’améliorer ses erreurs plutôt qu’une sanction montrant ses échecs. De plus, en jugeant le travail des autres, les élèves ont un aperçu de leurs propres performances au travers de celles de leurs pairs. Ce qui leurs permet de comprendre – ou de mieux comprendre – leurs erreurs (Brown, Rust & Gibbs, 19943 ; Zariski, 19964 ; Race, 19985).

Générer une grande quantité de feedback

En interrogeant la question de la passivité de l’étudiant dans le processus évaluatif, on en revient à un point central : l’objectif d’une évaluation. Celle-ci peut-être à visée sommative, afin de générer une note, ou à visée formative. Dans un cas comme dans l’autre, celle-ci sert à générer un feedback – un retour – sur la production d’un étudiant afin de l’aider à progresser. Pourtant, dans le monde universitaire, l’évaluation est majoritairement utilisée à visée certificative, cherchant à valider une UE, un diplôme. Evidemment, le problème se tourne vers le manque de temps des professeurs, ou le nombre d’étudiants trop importants. Mais avec l’évaluation par les pairs, on transforme le processus évaluatif en une méthode générant une grande quantité de feedback, or on sait que l’utilisation de feedback est la méthode pédagogique entrainant le plus de progrès chez les étudiants (Hattie, 19876).

Prouve la légitimité de l’évaluation des étudiants

On pourrait donc se poser la question de la légitimité, de l’aptitude des étudiants à produire des feedbacks. Mais en réalité, les étudiants peuvent produire un feedback aussi qualitatif et quantitatif que ceux des experts – les professeurs –, de plus, utilisant un jargon plus simple, plus proches du langage familier et habituel, leurs feedbacks facilitent même la compréhension (Cho, 20067 ; Cho, 20088 ; Cho, 20109). Rendre actif les étudiants dans le processus pédagogique permet aussi de contrecarrer la « malédiction de l’expertise », soit la difficulté que peuvent avoir des experts dans l’explicitation des processus, des mécanismes, qui sont pour eux devenus triviale et automatique (Camerer, 198910). Au-delà des feedbacks, si on demande aux étudiants de produire une note dans le procédé évaluatif, celle-ci sera fortement corrélé à celle qu’aurait donné un professeur. Prouvant la validité des évaluations produites par les étudiants (Falchikov, 200011 ; Freeman, 199512 ; Orsmond, 199613).

Développement des compétences

Pour vérifier ces effets, on peut s’intéresser à l’impact de l’évaluation par les pairs sur la performance des étudiants. Or, elle rend les apprentissages plus durables dans le temps et augmente de manière globale la performance universitaire (Double, 202014 ; Relatedly & Vickermann, 200915). Mais elle permet aussi de développer de nombreuses compétences. L’action combiné du jugement évaluatif et de la production d’un feedback – propre à l’évaluation par les pairs –, permet à la méthode de développé notamment l’autonomie, la confiance en ses capacités, la collaboration, la communication, l’esprit d’équipe, la pensée critique, la réflexivité et la capacité d’apprendre à apprendre (Reinholz, 2016 16; Slavin, 1990 17; Relatedly & Vickermann, 200915). Soit des compétences d’autant plus importantes qu’elles sont proches du monde du travail, permettant aux étudiants formés à l’aide de l’évaluation par les pairs d’être plus prêt, formé, au monde du travail (Boud & Soler, 2016 18; Weaver & Esposto, 2012 19; Kearney, 201320). Ces compétences sont ce qu’ont appellent des soft-skills, soit des compétences centrées sur les attitudes, celles-ci se développent d’autant plus quand on procède à des évaluations par les pairs « intra-groupe », centré sur les processus et les attitudes de travail au sein des groupes (Kennedy, 2006 21; Conway, 199322). L’évaluation intra-groupe a aussi l’avantage de diminuer le nombre de free-riders – les étudiants se laissant porter et profitant du travail des autres dans les projets de groupes – (Conway, 1993 22; Kench, 200923) (lire notre article sur l’évaluation par les pairs intra-groupe).

Augmentation de l’engagement

Du côté étudiant la méthode et de plus généralement perçu comme pertinente pédagogiquement et satisfaisante, ce qui permet d’augmenter l’engagement des étudiants dans les travaux demandés (Elliott, 2005 1; Relatedly & Vickermann, 200915). Finalement, l’évaluation par les pairs s’ancre parfaitement dans des stratégies de triangulation des méthodes – programme pédagogique comprenant plusieurs méthodes s’enrichissant entre elles – (Lire notre article sur l’apport de l’auto-évaluation sur l’évaluation par les pairs.) (Topping, 2003 24; Cho & MacArthur, 20109).

Les points à prendre en compte​​

Plusieurs points sont à prendre en compte dans l’application de la méthode pour que les étudiants puissent bénéficier pleinement de ces avantages.

point-1

L'authenticité

Que les évaluations soit réaliste et relève des connaissances et des compétences des étudiants.

point-2

La transparence

Mettre en place des processus d’évaluations claires et explicites pour tous les participants. Il est important que les critères d’évaluations soient maîtrisés par les étudiants, voire de les joindre dans le processus de création des critères.

point-3

L'équité

Que chaque étudiant puisse démontrer ses capacités et ses connaissances. Par conséquent, qu’il soit formé et préparé à l’exercice afin qu’ils puissent tous participer au processus avec la même base de connaissance.

point-4

L'entrainement

Utiliser la méthode de manière régulière améliore l’expertise des étudiants dans l’exercice de l’évaluation par les pairs.

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Bibliographie :

1 Elliot, N. et Higgins, A. (2005). Self and peer assessment – does it make a difference to student group work? Nurse Education in Practice, 5(1), 40-48. http://dx.doi.org/10.1016/j.nepr.2004.03.004

Brindley, C., and S. Scoffield. 1998. “Peer Assessment in Undergraduate Programmes.” Teaching in Higher Education 3 (1): 79–90.

3 Brown, S., Rust, C. and Gibbs, G. 1994 Involving students in the assessment process, in Strategies for Diversifying Assessments in Higher Education, Oxford: Oxford Centre for Staff Development, and at DeLiberations http://www.lgu.ac.uk/deliberations/ocsd-pubs/div-ass5.html
 
4 Zariski, A. 1996 Student peer assessment in tertiary education: Promise, perils and practice. In Abbott, J. and Willcoxson, L. (Eds), Teaching and Learning Within and Across Disciplines, p189-200. Proceedings of the 5th Annual Teaching and Learning Forum, Murdoch University, February 1996. Perth: Murdoch University. http://cleo.murdoch.edu.au/asu/pubs/tlf/tlf96/zaris189.htm

Baartman, L. K. J. (April 24, 2008). Assessing the assessment; development and use of quality criteria for competence assessment programmes. Doctoral dissertation. Utrecht, The Netherlands: University of Utrecht.

5 Race, P. 1995 The Art of Assessing, New Academic, Autumn 1995, 3-5 and Spring 1996, 3-6 and in DeLiberations http://www.lgu.ac.uk/deliberations/assessment/artof_fr.html

6 HATTIE, J.A. (1987) Identifying the salient facets of a model of student learning: a synthesis of meta-analyses, International Journal of Educational Research, vol. 11, pp. 187212.

7 Cho, K., Schunn, C. D., & Wilson, R. (2006). Validity and reliability of scaffolded peer assessment of writing from instructor and student perspectives. Journal of Educational Psychology, 98, 891e901

8 Cho, K., Chung, T. R., King, W. R., & Schunn, C. D. (2008). Peer-based computer-supported knowledge refinement: an empirical investigation. Communications of the ACM, 51(3), 83e88.

9 Cho, K., & MacArthur, C. (2010). Student revision with peer and expert reviewing. Learning and instruction20(4), 328-338.  

10 Camerer, C., Loewenstein, G., & Weber, M. (1989). The curse of knowledge in economic settings: an experimental analysis. The Journal of Political Economy, 97, 1232e1254.

11 Falchikov, N., & Goldfinch, J. (2000). Student peer assessment in higher education: A meta-analysis comparing peer and teacher marks. Review of educational research70(3), 287-322.

12 Freeman, M. (1995). Peer Assessment by Groups of Group Work. Assessment & Evaluation in Higher Education, 20(3), 289–300. doi:10.1080/0260293950200305 

13 Orsmond, P., Merry, S., & Reiling, K. (1996). The Importance of Marking Criteria in the Use of Peer Assessment. Assessment & Evaluation in Higher Education, 21(3), 239–250. doi:10.1080/0260293960210304 

14 Double, K. S., McGrane, J. A., & Hopfenbeck, T. N. (2020). The impact of peer assessment on academic performance: A meta-analysis of control group studies.

15 Vickerman, P. (2009). Student perspectives on formative peer assessment: an attempt to deepen learning?. Assessment and Evaluation in Higher Education, 34(2), 221-230. http://dx.doi.org/10.1080/02602930801955986

16 Reinholz, D. 2016. “The Assessment Cycle: A Model for Learning Through Peer Assessment.” Assessment & Evaluation in Higher Education 41 (2): 301–315.

17 SLAVIN, R. E. (1995) Cooperative Learning (Boston, Allyn and Bacon)

18 Boud, D., and R. Soler. 2016. “Sustainable Assessment Revisited.” Assessment & Evaluation in Higher Education 41 (3): 400–413
 
19 Weaver, D., and A. Esposto. 2012. “Peer Assessment as a Method of Improving Student Engagement.” Assessment & Evaluation in Higher Education 37 (7): 805–816.
 
20 Kearney, S. 2013. “Improving Engagement: The use of ‘Authentic Self-and Peer-assessment for Learning’to Enhance the Student Learning Experience.” Assessment & Evaluation in Higher Education 38 (7): 875–891.
 

21 Kennedy, G. J. (2005, January). Peer-assessment in group projects: is it worth it?. In Proceedings of the 7th Australasian conference on Computing education-Volume 42 (pp. 59-65).

22 Conway, R., Kember, D., Sivan, A., & Wu, M. (1993). Peer assessment of an individual‘s contribution to a group project. Assessment & Evaluation in Higher Education18(1), 45-56.
 
23 Kench, P. L., Field, N., Agudera, M., & Gill, M. (2009). Peer assessment of individual contributions to a group project: Student perceptions. Radiography, 15(2), 158–165. doi:10.1016/j.radi.2008.04.004
 
24 Topping, K. (2003). Self and peer assessment in school and university: Reliability, validity and utility. In Optimising new modes of assessment: In search of qualities and standards (pp. 55-87). Springer, Dordrecht.